Chapitre 15

 

Je n’avais pas de bol. Quand Lugh et moi changions trop souvent de contrôle, j’avais invariablement la nausée et j’étais encline aux violentes migraines. Plus les changements de contrôle étaient rapprochés, plus les symptômes empiraient. Deux fois en deux jours, c’était définitivement trop. J’avais l’impression qu’un forgeron laborieux avait établi résidence dans mon crâne.

Je me sentais trop mal pour poursuivre ma conversation avec Brian ou même me plaindre que Lugh ait pris le contrôle sans m’avertir. Brian ne semblait pas non plus disposé à discuter davantage. Il m’envoya me terrer dans la demi-obscurité réconfortante de ma chambre en attendant que les effets secondaires s’apaisent. D’après mes expériences passées, j’irais mieux dans quelques heures si Lugh ne prenait pas de nouveau le contrôle. S’il le faisait, j’étais partie pour au moins trois jours de souffrance.

Brian m’apporta de l’aspirine et un verre d’eau. Je les pris tout en sachant qu’ils n’auraient aucun effet. Le sang battait à mes tempes avec régularité et j’espérais que, par miracle, l’aspirine fonctionnerait cette fois.

Fidèle à sa promesse, Brian passa le reste de l’après-midi avec moi. Nous ne parlâmes pas beaucoup – c’était difficile pour moi d’être cohérente en ayant si mal à la tête –, mais je trouvai sa présence étrangement réconfortante. Je passai tout ce temps allongée sur le lit, les yeux fermés, en me concentrant pour chasser la douleur. Brian essaya de me soulager à l’aide d’un massage de dos que j’aurais certainement trouvé merveilleux en d’autres circonstances.

Je dus m’endormir en dépit de ma migraine, car le temps sembla passer sans que j’aie conscience des heures. Une minute, j’étais recroquevillée sur moi-même, l’oreiller sur la tête comme si cela pouvait d’une manière ou d’une autre empêcher la douleur de m’atteindre. La minute suivante, le téléphone sonnait et je décidai de laisser mon répondeur s’en charger. Je ne m’étais pas rendu compte que je m’étais endormie jusqu’à ce que Brian entre dans la chambre et s’assoie sur le lit.

— Adam et Raphael montent, dit-il en parlant bas par respect pour ma migraine. Ils ont dit que tu les attendais.

Je roulai sur le côté en grognant et soulevai l’oreiller en plissant les yeux vers Brian comme si j’étais aveuglée par le soleil.

— Je ne les attends pas avant 18 heures, dis-je en m’apprêtant à m’enfouir de nouveau sous mon oreiller.

— Morgane, il est 18 h 10.

Je laissai échapper un petit couinement de panique et me redressai si vite que ma tête se mit à battre encore plus fort. Je jetai un regard vers le réveil près du lit tout en sachant que Brian ne s’amuserait pas à ce genre de plaisanterie alors que je ne me sentais pas bien. C’était vrai, il était 18 heures passées.

— Merde, dis-je.

Brian fronça les sourcils.

— Est-ce que j’aurais dû leur dire de s’en aller ?

Je commençai à secouer la tête puis me ravisai.

— Non. De toute façon, ils seraient montés.

Le badge d’Adam fonctionnait comme un droit de passage permanent pour mon appartement. C’était probablement illégal de se servir de son badge sous des prétextes fallacieux, mais Adam n’était pas du genre à s’embarrasser de la loi.

— Tu peux les faire entrer pendant que je m’habille ?

J’avais ôté mon haut et mon soutien-gorge afin de pouvoir sentir les mains de Brian sur ma peau nue pendant qu’il me massait.

— Bien sûr, dit-il.

Le coup d’œil qu’il jeta sur mes seins nus me fit presque sourire.

Je pris mon temps pour m’habiller. L’idée de laisser Brian en compagnie d’Adam et Raphael trop longtemps ne m’excitait guère mais, chaque fois que je faisais un mouvement brusque, la douleur s’accentuait sous mon crâne.

Finalement, je les rejoignis dans le salon. Les hommes se disputaient pour je ne sais quelle raison, mais ils se turent tous à la seconde où je mis le pied dans la pièce, Brian était assis sur le canapé, l’air de nouveau énervé. Adam était installé sur l’accoudoir, le visage neutre. Et Raphael était affalé sur la causeuse avec une expression satisfaite et amusée.

Je me rappelai tardivement que j’avais prévu de remonter les bretelles à Raphael, mais il me parut tout à coup difficile de faire une scène avec une telle migraine. Il me vint aussi à l’esprit que je n’étais peut-être pas en état de me joindre à une équipe d’interrogatoire. Malgré tout, il était hors de question que je laisse faire Adam et Raphael sans surveillance. Peu importait qu’ils ne tiennent pas compte de ma « surveillance » chaque fois que cela les arrangeait.

— Tu es en état ? me demanda Adam, fort à propos.

Je ne voulais pas savoir ce que Brian leur avait raconté pour expliquer la raison de mon malaise.

Je redressai la tête et les épaules.

— Non, mais nous irons quand même.

Adam et Raphael se levèrent. Je ne tenais pourtant pas à partir tout de suite.

— Avant d’y aller, je veux savoir ce qu’il est prévu de faire avec le démon et l’hôte.

Adam et Raphael échangèrent un regard puis tournèrent vers moi leurs visages à l’expression neutre.

— Nos options sont comme qui dirait limitées, déclara Adam.

Je pense qu’il s’était désigné comme porte-parole.

— Alors laissez-moi vous expliquer ça de manière on ne peut plus claire, dis-je en rassemblant la moindre miette d’autorité disponible en moi. Ce soir, nous ne tuons personne. Et toi, poursuivis-je en montrant Raphael du doigt, tu ne retournes pas sur les lieux plus tard pour tuer quelqu’un.

Raphael haussa un sourcil.

— Ah oui ? (Je lui lançai un regard furieux qu’il affronta tranquillement sans ciller.) Et comment penses-tu donc m’en empêcher ?

Là, il me coinçait. Si je pouvais compter sur Lugh pour me prêter main-forte, j’aurais au moins l’espoir de faire obéir Raphael. Mais si Lugh avait approuvé le meurtre de Bradley Cooper, il n’y avait aucune raison de penser qu’il n’approuverait pas le meurtre de Jonathan Foreman, le tsar du recrutement illégal. Je massai mes tempes du bout des doigts pour essayer de chasser cette fichue migraine. J’avais assez de morts sur la conscience ! Je ne savais pas si je serais capable d’en supporter davantage.

— Si nous trouvons un moyen de ne tuer personne, dit Adam, nous le ferons.

Je ne sais pas s’il pouvait parler au nom de Raphael, mais j’étais certaine qu’il disait la vérité. Il était probablement aussi arrivé à la conclusion qu’un tel moyen n’existait pas.

— Dougal est censé être celui qui méprise la vie humaine, dit Brian en passant le bras autour de mes épaules dans un geste de solidarité. Nous sommes supposés être meilleurs que lui.

Raphael adressa à Brian un regard dédaigneux.

— Et qu’est-ce que tu nous conseillerais de faire ? Que nous dévoilions que nous sommes les partisans de Lugh à un démon haut placé sous le contrôle de Dougal avant de le relâcher pour qu’il puisse nous détruire ?

— Vous allez exorciser le démon, n’est-ce pas ?

Raphael haussa les épaules.

— Probablement.

— Alors il retournera au Royaume des démons où il ne peut pas nous faire de mal. Et son hôte n’est pas notre ennemi.

Raphael eut l’air encore plus méprisant.

— Et comment donc pouvons-nous être sûrs de ça ? Il y a de fortes chances qu’il se soit porté volontaire pour être possédé, comme Cooper. Un humain qui colporte des histoires est tout aussi dangereux qu’un démon. Peut-être même davantage, puisqu’il peut nous accuser de crimes divers. Tu sais que les tribunaux humains seront de son côté.

Brian avait l’air mal à l’aise et frustré. Je savais ce qu’il ressentait. C’était difficile de se dire qu’on agissait pour la bonne cause quand on envisageait un meurtre. Mais c’était tout aussi difficile de contrer la logique de Raphael. Nous n’avions aucun moyen d’adopter une position moralement plus élevée.

Le sang battait à mes tempes avec régularité et je pinçai l’arête de mon nez.

— Laisse tomber, Brian, dis-je. Tu ne gagneras jamais contre ces types. Ils ne feront que ce qui leur semble nécessaire et ils se fichent complètement de ce que nous pensons. (Je regardai Adam puis Raphael.) Est-ce que j’ai bien résumé la situation ?

Raphael m’adressa un sourire sardonique.

— Ouais, c’est assez juste.

Adam n’avait pas l’air de s’en réjouir mais il acquiesça malgré tout.

— Assez parlé, décida Raphael. Adam et moi allons interroger M. Foreman. Morgane, tu viens avec nous ou pas, tu choisis. Mais ne te mets pas en tête de nous empêcher de faire ce qui doit être fait.

— Je viens, dis-je avec un soupir résigné.

Brian ouvrit la bouche – je pense pour dire qu’il venait aussi, même s’il n’était pas convié. Je le fis taire d’un baiser rapide.

— Tu vas m’attendre ? lui demandai-je en espérant qu’il accepterait.

J’avais l’intuition qu’une fois que cette petite mission de terrain serait finie, j’allais avoir besoin de ses bras aimants.

— Tu veux que je reste ?

Je l’étreignis sauvagement.

— Oui, je veux que tu restes.

Son étreinte était plus hésitante que la mienne.

— Alors je vais t’attendre. Mais fais attention à toi, d’accord ?

La tête toujours douloureuse, l’estomac bouillonnant encore par moments, je m’arrachai des bras de Brian et acquiesçai.

 

Jonathan Foreman habitait, dans le sud de Philadelphie, un quartier à prédominance italienne consistant en rangées de maisons contiguës et identiques collées les unes aux autres, uniquement différenciées par les décorations extérieures. Certaines étaient en briques peintes, d’autres en briques brutes ; certaines avaient des volets, d’autres pas ; et une ou deux arboraient des jardinières garnies de fleurs, même si elles se trouvaient au premier ou au deuxième étage. En grandissant, j’avais appris de l’expérience de mes parents que toute chose plantée à portée de trottoir, risquait fortement d’être arrachée puis emportée comme souvenir. Ah, les joies de la vie en ville !

Les minuscules arrière-cours étaient presque inexistantes, si bien que le seul moyen d’accéder à la maison de Foreman était par la porte d’entrée. Adam y frappa pendant que Raphael et moi nous tenions sur le perron, quelques marches en contrebas. Il était rare qu’un citadin ouvre la porte à un inconnu, mais puisque Foreman était un hôte de démon légal et répertorié, nous avions supposé qu’il ne serait pas aussi prudent qu’un humain. Évidemment, il pouvait reconnaître le visage d’Adam – puisque ce dernier, en qualité de directeur des Forces spéciales, passait parfois au journal télévisé – et cela le rendrait plus méfiant.

Retenant notre souffle, nous attendîmes de voir quelle serait la réaction de Foreman – en supposant qu’il se trouve chez lui. Il pouvait très bien être en train de parcourir les rues de la ville à la recherche d’un autre paria susceptible d’être contraint à héberger un démon.

Je n’entendis aucun bruit provenant de derrière la porte, mais Adam avait dû percevoir quelque chose, car il se raidit légèrement. J’attendis que quelqu’un nous ouvre ou nous dise de partir, mais rien ne se produisit.

Raphael monta la dernière marche, au cas où Adam aurait besoin d’aide pour enfoncer la porte. Quelle que soit la raison de sa réaction, il avait eu une sacrée bonne idée, car j’entendis presque aussitôt une forte détonation, comme le bruit d’un moteur de voiture ayant un raté. Raphael entendit apparemment autre chose avant la détonation, car il poussa brusquement Adam pour lui faire éviter la balle qui perça un trou dans la porte.

Raphael hurla de douleur et se plia en deux en se serrant le ventre, tandis qu’Adam basculait involontairement en arrière sur la rambarde qui entourait le perron avant de tomber lourdement sur le trottoir. C’était toujours mieux que de se prendre une balle.

Sans qu’on ait besoin de me dire quoi que ce soit, je sautai par-dessus la rambarde et me collai contre le mur du perron qui m’offrit un semblant de protection. La porte de la maison s’ouvrit violemment et un poing s’écrasa sur le visage de Raphael, envoyant bouler ce dernier au bas des marches en laissant une belle trace de sang derrière lui.

Comparée aux démons, je me déplaçais au ralenti. J’étais en train de fouiller dans mon sac à main à la recherche de mon Taser, quand quelqu’un – Foreman, je suppose – dévala les marches, une arme à la main, et s’enfuit dans la rue. Adam, que sa chute n’avait apparemment pas blessé, se précipita à sa poursuite. Ils étaient tous les deux hors de portée quand mes doigts se refermèrent sur le Taser.

Les passants autour de nous avaient remarqué le remue-ménage – et les armes –, mais personne ne semblait paniquer. Ceux qui passaient en voiture jetaient un regard vers l’action avant de poursuivre leur route, et les piétons – la plupart d’entre eux, en tout cas – se contentaient juste de changer de direction et s’éloignaient d’un pas plus rapide. Et on appelle Philadelphie la ville de l’amour fraternel. C’est ça…

Une adolescente mâchouillant du chewing-gum appela les secours depuis son téléphone portable tout en regardant, les yeux écarquillés, la traînée de sang que Raphael avait laissée sur les marches. Étant bien trop choquée pour marcher, je rampai jusqu’à lui, recroquevillé sur le côté, les bras croisés sur son ventre. Il émettait de petits gémissements comme s’il souffrait le martyr mais, dès que je fus assez proche de lui, son regard rencontra le mien et je compris qu’il allait bien.

Vous voyez, Tommy Brewster n’est pas un hôte ordinaire. Il est le produit des expériences génétiques de Raphael et Dougal et il guérit beaucoup plus vite que les démons normaux. J’avais vu Dick – l’hôte actuel de Saul, qui était de la même « cuvée » que Tommy – se faire tirer deux fois dans la tête et cligner à peine des yeux. Bien sûr, le public ne sait rien de ces expérimentations ni de l’existence des superhôtes créés dans des laboratoires. Et c’est probablement mieux ainsi.

L’adolescente avait été la seule passante à nous venir en aide, mais à présent que la fusillade était finie, nous commencions à attirer une petite foule. Personne ne semblait pourtant vouloir trop s’approcher – comme si une blessure par balle était contagieuse. C’était, malgré tout, beaucoup plus d’attention que je souhaitais attirer. Je ne sais si la balle qui avait touché Raphael aurait tué un hôte normal, mais elle l’aurait en tout cas sacrément amoché.

La jeune fille rangea son téléphone après avoir pris une photo en douce. Ces téléphones portables qui font office d’appareils photo sont vraiment des inventions du diable.

— Une ambulance arrive, annonça-t-elle en se penchant sur Raphael pour mieux voir. Il va mourir ?

J’aurais aimé lui demander de reculer, mais elle avait appelé une ambulance, ce qui faisait d’elle une sorte de bon Samaritain. En général, je fais mon possible pour ne pas arracher la tête des bons Samaritains, même quand mon crâne me fait mal à hurler et que j’ai des problèmes par-dessus la tête.

— Il va s’en sortir, répondis-je. C’est un démon.

La fille écarquilla les yeux avant de faire le signe de croix et de reculer rapidement. Elle devait déjà regretter d’avoir appelé une ambulance. Dans un quartier italien comme celui-ci, il était normal de trouver une forte concentration de catholiques, et l’Église ne voyait jamais les démons d’un bon œil.

Raphael commença à se redresser et la fille ne fut plus la seule à reculer. Je me mordis la lèvre inférieure en me demandant où Adam pouvait bien se trouver. Je n’arrivais pas à savoir si j’espérais qu’il ait rattrapé Foreman ou non. Au moins, je n’avais pas entendu d’autres coups de feu.

— Tu es sûr que ce n’est pas trop tôt pour t’asseoir ? demandai-je à Raphael.

Il me vint soudain à l’esprit que Raphael avait peut-être sauvé la vie d’Adam en prenant une balle à sa place. Je n’arrivais pas à me faire à cette idée.

— Ça va, me dit-il, un bras toujours collé contre son abdomen. C’est juste une blessure superficielle.

Il m’adressa un faible sourire, mais je devinai que sa blessure avait presque complètement guéri.

Je regardai le sang qui imbibait sa chemise et qui maculait les marches. Les preuves suggéraient bien plus qu’une blessure superficielle. Il nous était impossible de masquer l’évidence alors que nous étions en plein jour, entourés de témoins, et qu’une ambulance et les policiers étaient en route.

En entendant les sirènes retentir au loin, j’éprouvai l’envie de m’en fuir. La police avait assez entendu parler de moi depuis que Lugh était entré dans ma vie, et me retrouver sur les lieux d’un nouveau crime violent n’allait pas arranger ma réputation. Bon sang, mais où était Adam ? Il n’allait pas non plus m’être d’un grand secours puisqu’il m’avait déjà sortie par le passé d’un certain nombre de situations délicates. Pourtant, je n’appréciais vraiment pas la perspective de m’adresser aux policiers en son absence.

Mes prières silencieuses restèrent sans réponse et les véhicules d’urgence convergèrent vers nous avant qu’Adam réapparaisse.

Péchés Capitaux
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